VOYAGE EN CAPPADOCE
Fin mai 2003, un groupe du cours “histoire et art du Moyen Age” est parti en Cappadoce avec Jean-Paul et Colette Deremble. Le but essentiel du voyage est d’explorer les églises byzantines excavées (creusées dans la roche) mais nous nous émerveillons aussi du paysage incomparable que nous offre la région qui se situe en Turquie au sud-est d’Ankara.
- En effet, à l’ère tertiaire, une couche de cendres volcaniques donnant une roche meuble (le tuf) est recouverte par des laves basaltiques. L’intense érosion thermique, hydrique et éolienne, sépare le sol en blocs qui donnent aujourd’hui un spectaculaire paysage de rochers (qui prennent souvent la forme de “cheminées de fées”) dans lesquels la population a creusé pour se faire des habitations et des lieux de culte avec des implantations soit érémitiques, soit communautaires soit mixtes : ermites vivant seuls mais avec des possibilités de regroupements périodiques.
- Le christianisme s’est implanté très tôt en Cappadoce et il a été particulièrement florissant aux IVe et Ve siècles avec les pères cappadociens que sont saint Basile, saint Grégoire de Nazianze et saint Grégoire de Nysse. Jusqu’au VIIe siècle, l’art byzantin règne en maître avec des thèmes que nous retrouverons constamment au cours de notre séjour : vie de Jésus de l’Annonciation jusqu’à la Résurrection, Christ “Pantocrator” (tout puissant) qui orne absides et coupoles, Marie “Theotokos” (mère de Dieu), scènes de “Deisis” (Marie et Jean-Baptiste intercédant pour les hommes auprès du Christ), sainte Hélène et Constantin tenant entre eux la croix, des saints (tel saint Georges) mais aussi beaucoup de saints locaux… Mais la chrétienté orientale connaît une période difficile à cause de la crise iconoclaste (726-843) : sous l'influence de l'Islam qui a commencé sa conquête, les images sont proscrites et seuls la Croix ainsi que des décors géométriques ou végétaux peuvent être représentés. |
Plus tard, la figure humaine étant réhabilitée, on assiste au milieu du Xe siècle puis au XIe siècle à l'apparition de peintres d'exception qui ont laissé des chefs d'oeuvre. Cette époque correspond aussi à l’avènement en 963 de Nicéphore Phocas, Cappadocien, comme empereur à Constantinople. Mais les invasions seljoukides, mongoles puis ottomanes, vont amener les habitants à s’enterrer dans d’immenses villes souterraines telle celle de Derinkuyu que nous avons visitée. Le coup de grâce sera donné en 1453 avec la prise de Constantinople par les Ottomans.
- Toute la Cappadoce regorge d’ermitages, de monastères et d’églises plus ou moins grandes, à une, deux ou trois nefs avec des absides et généralement des coupoles. Le chœur est souvent fermé par un mur de clôture ajouré qui a été excavé au moment de la construction de même que le mobilier liturgique : autel, ambon (sorte de chaire), niches, fosse à reliques, bancs… Le site de Göreme avec son musée en plein air présente un condensé intéressant des églises des Xe et XIe siècles : citons particulièrement “l’église à la boucle” (Tokali Kilise) et “l’église sombre” (Karanlik kilise) qui ont eu la chance d’être restaurées. Car ce patrimoine artistique est en péril à cause de l’érosion qui continue son œuvre et parce que la Turquie manque d’argent. Le tourisme est donc indispensable pour procéder aux travaux de restauration de ces églises. Mais, attention, pour une visite approfondie de ces sites, une bonne aptitude à la marche est quand même préférable… M. Bordes-Robinot |
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